Des récifs menacés

L’éloignement géographique, l’accès difficile, l’isolement relatif et la faible concentration de population (50 000 habitants) constituent à ce jour la plus grande défense des Raja Ampat contre la surutilisation et la surexploitation. Cependant, l’attrait de la richesse des ressources côtières et marines combiné avec une amélioration croissante de l’accessibilité en ont fait une cible privilégiée pour le développement économique d’activités allant du tourisme marin à la pêche jusqu’à l’exploitation minière et forestière. Aujourd’hui, alors qu’ils subissent déjà les effets du changement climatique induit par l’homme qui affecte les récifs à l’échelle mondiale, les récifs de Raja Ampat doivent faire face à une série de menaces nouvelles et émergentes directement issues du développement des industries locales.

Avant les restrictions de voyage induites par l’épidémie de CoVid-19 et l’arrêt brusque du tourisme dans la région des Raja Ampat, les infrastructures et la mise en œuvre des réglementations n’avaient déjà plus la capacité de faire face à la pression touristique existante et croissante d’année en année. Avant le CoVid-19, le volume de touristes dépassait les capacités de gestion disponibles, ne permettant pas une application efficace des réglementations visant à un développement durable de la région.

Pour éviter un retour à cette situation critique, le plus urgent est de mettre en place une gestion et un suivi plus efficaces de l’impact du développement touristique et des indicateurs écologiques au sein des Aires Marines Protégées mais aussi de proposer des solutions à l’industrie touristique afin qu’elle puisse s’investir véritablement dans la voie du  tourisme durable. Il est essentiel de soutenir l’aspect logistique, une gestion optimale des infrastructures et de mettre en place des systèmes de suivi pour limiter l’impact croissant du développement touristique sur la région.

The SEA people travaille en collaboration avec de multiples acteurs locaux dans l’objectif de développer des solutions pour soutenir une industrie touristique durable, protéger l’environnement marin et soutenir les communautés locales.

Le défi

Un développement rapide et non-viable 

Il y a à peine une quinzaine d’années, seulement 2 ou 3 bateaux de croisière opéraient durant quelques mois par an dans la région peu connue et difficile d’accès des Raja Ampat. Cinq ans plus tard, on pouvait dénombrer 5 à 8 opérateurs terrestres et seulement 3000 touristes par an. En 2019, le nombre de touristes (recensés) atteint les 46 000, ils sont hébergés par plus de 20 resorts et un réseau de maisons d’hôtes qui ne cesse de croître, sur l’eau se croisent plus de 100 bateaux de croisière et un nombre croissant de navires privés. Auparavant, les ONGs de conservation et les acteurs concernés étaient arrivés à un consensus général selon lequel le tourisme apporterait de véritables solutions à un certain nombre de problèmes socio-économiques et de conservation :

1) Il fournirait des moyens de subsistance durables et dont pourraient directement bénéficier les populations locales en remplaçant les activités destructives telles que la pêche à la dynamite, la pêche des requins pour leurs ailerons, l’exploitation minière ou la déforestation.

2) La présence de touristes servirait (sert actuellement !) de système de réglementation informel qui découragerait les comportements illégaux et extractifs

3) Les revenus générés par le tourisme démontreraient la valeur économique d’un écosystème marin intact et, ce faisant, assureraient sa protection

 

Un bateau de croisière de 4200 tonnes a détruit 1600m2 de corail intact dans les eaux peu profondes de l’île de Kri, Raja Ampat. Mars 2017. Crédit Photo : SCMP

Cependant, comme c’est le cas pour de nombreux endroits magnifiques, lointains et peu développés de la planète, l’information s’est rapidement propagée et Raja Ampat est rapidement devenu le lieu incontournable, “à voir absolument” sur la liste de tous les plongeurs et voyageurs intrépides. Au cours des 5 à 7 dernières années, grâce aux efforts de promotion au niveau national et international de l’industrie touristique, la région a connu une période de développement rapide et sans précédent.

Le détroit de Dampier est au cœur de ce développement; avec ses forts courants et ses remontées d’eau chargées de nutriments (upwelling) qui rendent la vie marine florissante et abondante. Ce sont ces mêmes mouvements de masses d’eau qui impactent et influencent la L’archipel des Raja Ampat d’une manière plus globale. Ce qui signifie que toutes les perturbations que subira le détroit de Dampier se répercuteront sur les Raja ampat au sens large.

Alors que le nombre de touristes a décuplé et continue d’augmenter de façon exponentielle (avant Covid-19), il y a un profond décalage entre cette croissance et le développement des infrastructures nécessaires pour protéger les récifs et desservir l’industrie qui explose rapidement.

Cette croissance trop rapide a entraîné le développement d’un grand nombre d’activités et de perturbations environnementales sans que la région ne soit préparée à les gérer du point de vue des infrastructures et de la logistique. Les récifs des Raja Ampat doivent maintenant faire face à des menaces comme l’augmentation du trafic maritime, les dégâts provoqués par les mouillages, les impacts de bateaux sur les récifs, l’augmentation de la production de déchets, la pollution par les eaux d’assainissement et, d’une manière générale, l’augmentation des dégradations des récifs.

Et bien que le tourisme peut effectivement apporter des solutions à un certain nombre de problèmes environnementaux, cela n’est valable que s’il est mis en œuvre avec une planification réellement durable et mûrement réfléchie.

The SEA people travaille actuellement avec les communautés et le gouvernement local, les opérateurs touristiques et d’autres acteurs de terrain pour résoudre ces problèmes et mettre en œuvre des solutions durables qui sont bénéfiques pour l’environnement et pour toutes les acteurs concernés.

Des récifs sous pression  

Une étude de Renoldy L Papilaya et al (2019) a estimé que les récifs les plus prisés dépassent largement leur capacité de charge écologique (c.-à-d. Le seuil limite d’utilisation par les visiteurs et les dommages accidentels que l’écosystème des récifs coralliens peut supporter sans être dégradés), mais la pression continue de croître. D’un point de vue écologique, il y a des signes visibles de dommages, de maladies et de pollution dans toute la région, suscitant l’inquiétude des scientifiques et des écologistes, et le mécontentement des touristes qui recherchent des récifs vierges et peu fréquentés comme décrits dans leurs lectures. Plus alarmant encore, les références pour le terme «intact» changent peu à peu, beaucoup considérant cet état de dégradation comme «vierge», en comparaison aux récifs fortement dégradés, voire morts, dans d’autres régions du monde.

Sur les 70 sites de plongée sur lesquels nous récupérons des données dans le cadre de notre projet de surveillance et de suivi “Orang Laut Raja Ampat”, 9 sites de plongée représentent 50% de la pression touristique.

Stabilisation du substrat

Alors qu’une grande partie des Raja Ampat reste relativement vierge, derrière ce tableau idyllique se cachent les effets des perturbations et pressions anthropiques à l’image de nombreux récifs dégradés et de vastes zones recouvertes de débris de corail. Ce sont les conséquences des pratiques de pêche destructives (pêche à la dynamite et au Cyanure) des années 80 jusqu’au début des années 2000. A ce jour, bon nombre d’entre eux n’ont toujours pas récupéré. Ces récifs dégradés ne peuvent, pour ainsi dire, pas se régénérer sans assistance et constituent en outre une menace pour les récifs sains situés à proximité (voir schéma).

En collaboration avec les communautés locales, The SEA people restaure les zones dégradées des récifs en utilisant des techniques de stabilisation du substrat qui permettent aux polypes coralliens de s’implanter et de se développer avec succès, pour finalement rétablir de vastes réseaux de récifs sains qui maintiennent la richesse de la biodiversité pour laquelle les Raja Ampat sont connu. Pour plus de détails, voir notre projet Yaf Keru.

 

Dégradation du corail – Dommages physiques

Dommages liés aux mouillages et échouements de bateaux

La complexité des courants et la topographie des Raja Ampat rendent très difficile, pour les bateaux de croisière et les voiliers privés, le mouillage en toute sécurité sans prendre le risque d’endommager les récifs coralliens. À l’heure actuelle, peu de bouées d’amarrage existent dans le parc marin, ne laissant d’autre choix aux navires que de mouiller à des profondeurs où les récifs coralliens sont présents, et cela même jusqu’entre 35 et 50 m. Ceci, combiné à une absence de cartes nautiques détaillées, à un manque potentiel de sensibilisation et à la négligence de la part des opérateurs de croisières, engendre des dommages importants aux récifs des parcs marins, en particulier sur ceux qui sont le plus fréquentés par le tourisme.

 

Piétinement et écrasement
L’augmentation rapide de la densité touristique combinée à un manque de sensibilisation à l’environnement provoque une augmentation permanente de la dégradation physique des récifs peu profonds dans les zones les plus fréquentées.

 

Etoile de mer couronne d’épines (COTS)

Ces étoiles de mer mangeuses de coraux peuvent dévaster des récifs entiers lorsque leurs populations augmentent anormalement en raison de pollutions organiques, du réchauffement des eaux ou de la surpêche de leurs prédateurs. A l’heure actuelle, des populations de COTS ont atteint le niveau épidémique dans plusieurs récifs des parcs marins. Cette situation de type invasive est difficile à évaluer et ne peut être contenue que par une forte collaboration entre les acteurs de terrain afin d’endiguer ces épidémies. Nous avons mis en place une approche participative sous forme de science citoyenne ouverte à toute personne ou organisation souhaitant y contribuer.

Vous trouverez plus d’informations à propos de notre action collaborative sur les pages “infographie de l’épidémie de COTS” et “COTS aux Raja Ampat”.

C’est Maintenant ou Jamais.

À une époque où la dégradation des récifs coralliens s’accélère dans le monde entier en raison de l’activité humaine et en réponse aux changements climatiques induits par l’homme, il est essentiel et urgent de concevoir et de développer des outils de conservation communautaires pour faire face à ces problèmes de dégradation actuels et futurs. Plutôt que d’attendre sans agir que les récifs encore vierges des Raja Ampat soient détruits, endommagés ou perdent leur résilience naturelle comme pour près de 50% ds récifs de la planète, nous avons choisi de collaborer avec les communautés locales dans des projets qui soutiennent et encouragent l’utilisation durable et la protection des ressources marines. Nous travaillons actuellement sur des solutions mutuellement bénéfiques en collaboration avec les acteurs locaux, afin de faire face à ces menaces nouvelles et émergentes pour les récifs des Raja Ampat et les communautés locales qui en dépendent.

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